CHAPITRE VI
Dor Ennieh terminait une énième journée d’un labeur pour lequel il n’était pas certain d’avoir encore le goût. En fait, il n’était plus très sûr d’avoir le goût à rien. En soi, le travail effectué au CEK était passionnant ; le problème était que ce n’était pas lui qui l’abattait et que son rôle se résumait de plus en plus à arbitrer les guerres, ouvertes ou larvées, qui opposaient Avelange et Naï Semar – hélas revenu ! – à Tamane et Eïr Fiho – hélas toujours là ! Les kineïres de Foehn étaient partagés en deux clans : les inconditionnels zélateurs du programme Jarlad, et les anti-Éthiques nihilistes qui suivaient Eïr. Dor était un boomerang, qui naviguait des uns aux autres avec l’unique souci d’éviter la catastrophe, l’ansible perpétuellement branché vers Thalie. Si le rôle de médiateur lui déplaisait, il avait trop conscience de ne servir qu’à contenir Semar et protéger Tamane et Fiho pour se laver les mains de cet affrontement.
Naï disait : « Fiho n’œuvre qu’à l’échec de notre programme. » Et il avait raison.
Eïr disait : « Semar est en train de former une élite paramilitaire. » Et ce n’était que trop vrai.
Au début, Dor avait délibérément pris le parti de Jarlad et s’était totalement investi dans la conception du projet éducatif ; Tamane était avec lui. Eïr bougonnait mais ne s’y opposait pas ouvertement. Puis, le soir même où le projet avait été enfin bouclé, il avait présenté son analyse prospective.
— Voilà ce que nous venons de mettre en place, avait-il conclu. Voilà qui nous allons dresser à faire quoi.
Et Tamane avait commencé à douter. Il lui avait fallu moins d’une semaine pour se ranger à l’opinion de Fiho et à peine deux pour convaincre Doholavehi. Dor les avait tancés fortement, voire vertement, et, un matin, il avait découvert Tamane dans son bureau. Elle l’attendait.
— Je viens de trouver ça.
Elle agitait la dernière lettre de Mademoisel.
— Qui vous a permis…
— Vous êtes ordonné, Dor, vous classez tout. La date de cette lettre est une mauvaise surprise pour moi. Si vous m’aviez alors informée de son contenu, je me serais dressée dès le départ contre le programme de Jarlad… comme vous auriez dû le faire !
— De quel droit…
— Êtes-vous certain de former des kineïres ? (Tamane répétait la dernière phrase de la missive.) Ma réponse est un non catégorique, Dor. Quelle est la vôtre ?
Dor n’avait pu ni répondre, ni tenter encore de s’indigner. Tamane était partie ; mais à dater de ce jour, il avait souffert. Mademoisel et Tamane avaient été les deux joies de son existence – les enfants qu’il n’avait pu avoir ? Or, l’une après l’autre, elles s’étaient élevées contre ses rêves, ses intentions, ses croyances, ses agissements… Pouvait-il encore se buter ? Il avait trouvé un moyen terme en travaillant dans le sens de ses idées et préservant son cœur des foudres que Semar pouvait abattre sur Tamane.
Ce soir, il avait conscience de se nier sur tous les plans. Comme tous les soirs désormais, il quitta son bureau abattu.
*
**
— Maes.
Dor sursauta. La pénombre lui avait caché celui qui l’attendait, assis sous l’auvent contre le mur de Myve. La lumière du soleil couchant était insuffisante pour qu’il distinguât ses traits, mais son cœur battait à tout rompre. La scène avait l’amertume d’un déjà-vu lointain et désagréable.
L’homme – c’était une voix d’homme – bondit sur ses jambes plutôt qu’il ne se redressa.
— Cette fois, d’une certaine façon, je suis revenu.
Ennieh dut s’appuyer à la colonnade ; ses jambes tremblaient à ne plus le soutenir. L’autre était bien visible maintenant et, malgré le masque du temps, son visage était indubitablement celui d’Ylvain.
— Ylvain ?… Ylvain ?
— Oui, maes. Ylvain.
Ennieh était paralysé. C’était impossible, dément ! Ylvain ne pouvait pas être là ! L’homme dut percevoir son incrédulité, car il s’avança et tendit la main.
— Bonsoir, maes.
Dor hésita puis serra cette main, faiblement d’abord, puis comme on étreint celle d’une connaissance depuis longtemps perdue. Pourtant, il aurait dû avoir peur de ce fantôme ; seulement l’instant était chargé d’une émotion tout autre, que même une prémonition d’holocauste ne pouvait altérer. C’était presque un soulagement d’avoir cette… cette mort en face de soi ; parce que, il n’en doutait pas, la présence d’Ylvain en ce lieu, à cet instant, était un présage de mort : celle du CEK, celle d’une éthique, celle de sa conception de l’humanité.
— Je… je ne sais pas quoi dire, bafouilla-t-il. Il y a si longtemps… Je… Vous… Je vous croyais en pr… sur Thalie… Je veux dire… que… que faites-vous… Enfin… que…
— L’entropie vous a rattrapé, maes. Le prédateur que j’étais parti chercher était en moi. Vous vous souvenez ? (Ylvain n’attendait pas de réponse.) Je suis venu fermer le CEK, maes directeur, le temps de crever l’abcès de l’Homéocratie.
Dor buvait chaque parole. Il ne pouvait pas douter de la puissance d’Ylvain. Ylvain que Jarlad avait enfermé sur Thalie – quelle farce ! – Ylvain était sur Foehn pour accomplir ce qu’il disait et rien n’y changerait rien. Ce n’était même pas de la fascination, c’était la reconnaissance d’un accomplissement qu’il n’avait au fond jamais ignoré.
— Il est l’heure du chacun pour soi, maes. Vous avez trop tardé à choisir votre propre voie. Votre existence entière a été une suite de futilités nocives et de servitude aveugle, vous avez échoué en tout parce que vous n’étiez qu’une marionnette… Je peux vous donner les ciseaux pour couper les ficelles.
— Que… que va devenir le Centre ?
Dor était écrasé, soumis ; il admettait chaque mot, il admettait la fatalité comme si, vermisseau qu’il était, il entendait les vérités passées et à venir énoncées par les lèvres du destin lui-même.
— Marchons, invita Ylvain.
Ils empruntèrent comme autrefois, ailleurs, la direction des bâtiments d’habitation. Ylvain révélait cet avenir si proche et si lointain pour lequel Dor avait un choix à faire ; rien n’était plus fort que cette conscience d’avoir à choisir ! Mademoisel reprendrait Foehn, c’était ce qu’elle désirait et ce pourquoi elle était formée – c’était si crûment véridique… Dor l’avait formée ! Elle en assumerait la gestion complète ; elle choisirait les individus, les moyens, les buts, et elle fabriquerait des psis, pas des kineux. L’École Tashent serait reconstruite et Toyosuma la dirigerait, seul. Et l’Institut ?
— Vous pensez-vous capable de lui redonner sa notoriété passé, maes ? Pouvez-vous relever le défi de le faire sans assistance et sans ordre, avec un concurrent de taille ?
Oh oui, il pouvait ! Il ne souhaitait que cela : retrouver Chimë et l’intégrité.
— Mais… la Commission ? Comment échapper…
— L’Homéocratie va devoir apprendre à se passer de la Commission.
C’était tout, c’était aussi simple. Dor n’avait pas à savoir, il ne voulait pas savoir quels feux Ylvain lâcherait sur la Commission, mais il n’en resterait rien.
À leur droite, derrière le rideau de cyprès, se trouvait la villa de Naï. Sur la pierre devant la porte, encore une pierre de Myve, quelqu’un les attendait, assis comme l’avait été Ylvain. Une jeune femme très belle aux yeux rieurs, aux yeux de violence.
— Maes, je vous présente Ely… Elynehil Mayalahani. Semar a essayé de la faire enlever sur Lamar, elle a un compte à régler avec lui.
— Deux, précisa la Mayalahani. Je ne lui ai pas pardonné d’avoir détruit Tashent.
— C’est… ?
Oui, c’était Naï qui avait rasé l’École et déporté ses kineïres. Dor se réjouit que justice soit faite, et le caractère expéditif qu’elle prenait ne le heurta même pas. Ylvain lui ayant désigné la porte, il frappa à l’huis. La nuit était bel, et bien tombée à présent.
Naï Semar déclencha l’ouverture, de son bureau : il ne se dérangeait jamais pour accueillir les visiteurs. Ils pénétrèrent tous trois dans la maison, traversèrent le hall et trouvèrent Semar dans sa grande pièce de travail. Il leur tournait le dos.
— Je vous ai amené de vieilles connaissances, annonça Dor.
Cette formulation lui paraissait des plus appropriées et subtilement cocasse.
Semar ne se leva pas mais tourna une partie du buste pour jeter un œil négligent sur les arrivants. Il en tomba de sa chaise.
— Vous ! beugla-t-il, les yeux exorbités, la mâchoire inélégamment tordue. Vous !
Si Dor avait eu du mal à admettre la présence d’Ylvain sur Foehn, Naï le fit instantanément ; pourtant, lui, le cauchemar l’horrifiait hors de toutes proportions. Il avait d’ailleurs de nombreuses et obscures raisons d’être terrifié.
— Souhaitez-vous nous suivre de votre plein gré, Semar ? demanda Ylvain. Ou préférez-vous qu’Ely vous y contraigne ?
La Mayalahani exécuta une curieuse danse, tournoyant sur elle-même si rapidement qu’il était difficile de la suivre. Tantôt elle lançait une jambe, tantôt un poing, et chaque fois un meuble volait en éclats. Semar ne paraissait cependant pas capable de se décider, elle l’aida en lui ouvrant la lèvre du bout du pied, puis la pommette droite, puis…
— Arrêtez ! s’égosilla Naï. Je… je vous suis.
Exultante, la Mayalahani le jeta plus qu’elle ne le poussa à travers la pièce, puis le hall, puis au-dehors, enfin d’une grappe de mètres à une autre, jusqu’au pavillon de Tamane qu’il atteignit dans un état de délabrement pittoresque. Dor marchait un peu en arrière, aux côtés d’Ylvain.
— Elle va le tuer, n’est-ce pas ?
— Non, maes. Elle va lui laver le cerveau, l’astiquer jusqu’à ce qu’il soit net de toute intelligence. Semar ne mérite pas de mourir.
Dor frissonna, et son frisson se transforma en tremblement, et son tremblement en une grosse larme stupide qui lui brûla la joue. Devant le pavillon, dans un fauteuil non-g, un sourire d’un côté du visage à l’autre – ce magnifique visage de Néréide – Mademoisel, sa petite perle de Mademoisel, trônait. Elle était clouée des blessures d’horreur, à moitié paralysée par des restes d’attentat, mais pour Ennieh elle trônait. Il vit tout de suite que deux petites ridules marquaient le coin de ses yeux, deux rides qu’il qualifia de rire tout en les sachant de lassitude et de souffrance.
— Je suis contente de vous revoir, maes.
Il s’avança vers elle, la serra aux épaules – comme un père ? – plongea ses yeux mouillés dans la sagesse moqueuse des siens et eut ce mot absurde :
— Pardon.
Il se sentait petit et ridicule, il se sentait coupable, il se savait vieux recteur débile et gâteux, mais cela faisait du bien d’être tout connement humain.
— Ylvain vous a expliqué, maes ?
Il hocha la tête.
— Tant mieux. L’heure approche, maes. Nous comprendrons si vous choisissez la retraite, bien sûr. Rentrez chez vous, maintenant, examinez votre vie et décidez de ce qu’il vous reste à accomplir. Nous nous verrons demain.
Tamane était sur le pas de sa porte, contemplant, éberluée, tout ce monde insolite qui venait jusqu’à elle. Dor la salua d’un geste et s’en retourna. Tamane et Mademoisel avaient été amies, elles aussi devaient jouir de leurs retrouvailles. Lui avait un choix à faire.
*
**
Made regarda Ennieh s’éloigner. Elle n’éprouvait aucun sentiment à son égard ; il était un pion, elle manœuvrait ce pion. Elle inspira à fond et se tourna vers Tamane… Du moins, le fauteuil pivota vers le pavillon, et Tamane se trouva face à elle.
— Il y avait longtemps, hein, Tam ? Tu nous fais entrer ?
— Semar et toi ? J’attendais que tu te décides.
— Semar et moi, hein ? Je t’adore, Tam.
Ely propulsa Semar dans la maison, où elle l’assomma d’une manchette à la nuque. Made effaça alors le fauteuil, Ylvain, Ely, puis suivit Tamane à l’intérieur. Malgré l’effort de cette interminable projection, elle était dans sa meilleure forme. Elle allait pouvoir affronter le cerveau de Tamane, mais d’abord…
— Comment as-tu deviné que seuls Semar et moi étions réels ?
Son amie la guida jusqu’à la cuisine.
— J’étais en train de manger, j’ajoute un couvert ? (Elle attendit l’acquiescement de Made.) Dor aussi était réel. Ce sont les aberrations dans son comportement qui m’ont alertée. J’ai sondé.
— Je ne t’ai pas sentie.
— Il n’y a pas que toi qui aies affiné son talent. Assieds-toi.
Made s’exécuta et observa minutieusement Tamane pendant qu’elle s’agitait d’un meuble à l’autre. Elle n’avait pas changé, pas d’une seule cellule, et elle se comportait comme si elles avaient continué à se voir toutes ces années. « Tant mieux ! » se dit la kineïre. « J’ai trop besoin d’elle. »
— Pour faire quoi ? la surprit Tamane.
— Bonjour l’intimité ! s’exclama Made quand elle eut repris son contrôle d’elle-même. Tu fais ça tout le temps ?
— Pas tout à fait. Et toi ?
— Pas davantage… Encore que ces derniers temps…
Elles éclatèrent simultanément de rire. Elles se retrouvaient et c’était facile, facile de faire comme si rien n’avait changé, facile d’être complices.
— Raconte, se jetèrent-elles ensemble, ce qui provoqua un nouvel éclat de rire.
*
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Elles se racontèrent, elles rirent, burent et mangèrent, et se racontèrent encore. Made envoya tout de même une fois l’illusion d’Ely assommer Semar pour qu’il ne les dérange pas. Tamane se vida de ses frustrations, Made exprima ses insatisfactions ; une nuit suffit à raviver un lien qu’aucune hypocrisie ne pouvait trancher. L’aube les trouva bavardant dans le salon et réveilla leur conscience du présent.
— Es-tu certaine qu’Ennieh ne te filera pas entre les doigts ? interrogea Tamane. Ton truc…
— Mon truc s’appelle un faisceau d’inhibition. C’est efficace tant que je projette, mais je ne peux pas garantir que cela impressionne suffisamment un cerveau récepteur. Avec Ennieh, j’ai forcé sur l’égojection. (Avant que Tamane ne posât de questions, Made expliqua :) Je lui ai fait vivre un keïn comme une réalité. Ce qu’il a vu et entendu n’existait pas mais s’est fixé dans sa mémoire. Et je suis allée bien plus loin : tout ce qu’il a éprouvé de sentiments et d’émotions est synthétique. C’est l’égojection. Ennieh est un affreux sentimental ; j’ai donc joué là-dessus, en m’efforçant d’effacer sa fidélité crétine à l’Éthique. Le but du jeu est de ne pas heurter le système de références… Normalement, je ne devrais pas avoir de surprise. (Elle chassa le sujet d’un geste de la main.) Veux-tu m’aider, Tam ?
— À quoi ? Et pourquoi ?
Des pourquoi, Made en débita tant que Tamane dut l’arrêter. Elle le fit néanmoins quand elle eut entendu ce qu’elle désirait entendre.
— D’accord, Made, pour Foehn, pour ce que tu veux en faire. Seulement tu devras me garder dans ton ombre. (C’était absurde de parler comme cela, mais elle devait le dire.) Dans l’immédiat, comment puis-je t’aider ?
— Nous allons embarquer Ennieh et Fiho pour Thalie. J’espère que celui-là est aussi fiable que tu le prétends.
— Il va falloir que tu apprennes à ne pas douter de moi.
— Compris. (Made aspira une longue bouffée d’air.) Nous allons devoir affronter le Détecteur, Tam, et tout ce que je sais de cette horreur m’incline à penser que nous pouvons le traiter comme un cerveau humain.
« Ely dit qu’elle peut forcer n’importe qui à croire n’importe quoi. (Made vit que Tamane souriait : elle avait compris.) C’est possible, mais les connexions d’un ordinateur pseudo-conscient n’ont aucun rapport avec un névraxe. Le Contrôle Central a une totale maîtrise de chacune d’entre elles, il peut s’en isoler, les dévier, filtrer, créer des boucles, etc. Nous allons tenter de le déjouer à trois. Ely va projeter un faisceau que tu suivras dans les circuits ; parallèlement, tu me retransmettras les réactions du Détecteur ; j’analyserai et… »
— Je serai votre lien avec la machine, okay. Ely doit savoir quoi projeter, tu le lui diras donc d’après ce que j’aurai intercepté. L’idée est bonne, mais ta copine a intérêt à mettre le paquet, sinon le Contrôle Central cherchera à m’éradiquer.
Made ne releva pas. L’analyse était malheureusement correcte : Tamane prendrait le plus gros risque.
— Nous allons nous faire la main sur Semar, annonça-t-elle brutalement. Tu vas le sonder le plus profondément possible pendant que j’excite sa mémoire. J’ai besoin de savoir ce qu’il cache.
— À propos de quoi ?
— Jarlad.
— Bon sang ! Jarlad ! (Tamane avait failli oublier sa rencontre avec le chef de la Commission.) Je l’ai sondé une fois… Il possède un potentiel psionique gigantesque, quelque chose d’effrayant ! Je ne sais pas ce qu’il peut faire avec, mais je ne m’y frotterais pas.
« Voilà autre chose ! » songea Made. « Mais cela éclaire certaines obscurités. »
— Voyons si ce brave Semar peut nous renseigner et si tu sais faire le pont, Tam.
Tamane savait. Semar, par contre, n’était pas l’informateur idéal. Il connaissait l’avenir du CEK selon Jarlad, celui de l’Institut et où étaient enfermés les kineïres Tashent, mais rien de ce qui intéressait Made – à part peut-être que Jarlad avait assisté à une projection du groupe bohème sur Terre. Ce qui ne semblait pas d’une grande utilité.
Made fit ce qu’elle avait annoncé à Ennieh : elle transforma Semar en légume. Ensuite, Tamane et elle prirent certaines précautions pour que ni le Préfet de Foehn, ni Avalange n’alertassent la Commission.
Tout cela avait été facile et rapide. Made était satisfaite. Elle bouillait de précipiter cette fin qu’Ylvain avait imaginée. Elle ne rêvait plus que de l’après-Ylvain.